Nous, nous vivons !

Christian Jean

Christian Jean est ancien responsable de l’aumônerie régionale hospitalière du culte musulman et vice- président du Comité laïc d’action sociale et environnementale. Il a publié en 2022 Le préfet de l’islam et l’indigène de la République.

Y a-t-il plus belle déclaration pour un croyant monothéiste que la grandeur de Dieu ?
Allah, Hachem ou Dieu, quelle que soit la traduction dans la langue des hommes, Dieu, l’Unique, le Créateur, est le même dans le cœur de tous. Nos prières lui sont adressées dans beaucoup de langues et de rituels que nous pouvons entendre et observer.
Le souffle des cœurs, la sublime ascendance et l’inclination vers nos éternités enfouies demeurent, eux, dans le secret des cœurs et la nuit des consciences.
Ce que nous percevons aussi les uns des autres, au-delà des psalmodies multiples, ce sont les mots et les actes que nous versons dans le panier de la vie. Ils sont nos signatures les uns sur les autres, ce que nous transmettons, donnons et recevons.
Ces interactions sont le liant de la vie. Elles sont la vie car par elles nous nous vivons et « nous nous vivons ».
Aimer est le premier et le plus bel acte qu’il nous soit « donné de donner » en offrande à Dieu, à soi, aux autres. Contrairement à la mort, cet amour nous appartient. Il se désire, se donne et se reçoit. Par lui se tisse le visage de l’humanité et avec lui s’esquisse son sourire.

Sarah Halimi, tuée au nom de la haine érigée en divinité.


Ce visage s’obscurcit et invite la nuit éternelle dans son sourire quand une âme est enlevée au souffle des jours, comme il en a été le cas avec Sarah Halimi, tuée au nom de la haine érigée en divinité. Or la haine n’a pas de royaume, pas d’infini, pas de racines et pas d’ailes.
Elle n’a que de sombres disciples égarés entre la soif de nuire et l’obsession de détruire. La mort ne peut être qu’un enfant du destin, un instant où la nuit nous appelle à la route ultime, jamais l’acte d’un crime venant interrompre la mélodie du jour.
Sarah, nous te demandons pardon, comme Français, comme humains, comme Juifs de cœur, comme vivants. Pardon de t’avoir perdue tout comme le sens de la justice s’est égaré dans nos rangs.
Nous t’espérons au royaume de ce qui t’est cher, et nous nous espérons guéris du mal qui t’a désignée et ravie à la vie, même si, crois l’honnête homme enseveli de larmes à ton souvenir, rien n’est plus vivant que toi et ton souvenir.

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