Qui donc, depuis les ordres des anges, laisserait un cri sans réponse?, se demande Rilke dans la première élégie de Duino. La désespérance du poète est tout entière dans la question : il sait qu’un cri poussé en plein jour ou au cœur de la nuit n’aura aucun écho. L’appel suscitera indifférence, détachement, peut-être même dédain. Les hommes s’en détourneront et personne ne sera à l’écoute : le son, balayé par le vent, se perdra dans le vide et le silence régnera à nouveau. Rilke l’affirme : seuls les morts et les saints réagiront à la tristesse venue des profondeurs de l’être.