La colère exprimée par une large partie de l’opinion publique face à l’arrêt de la Cour de cassation d’avril 2021 confirmant «l’irresponsabilité» du meurtrier de Sarah Halimi s’est nourrie de trois ans d’un relatif mutisme des médias et des autorités, à quoi s’ajoute une certaine condescendance de la justice.
Le Juif a des ennemis passionnés
– Jean-Paul Sartre
et des défenseurs sans passion.
Il y a de longs silences inexplicables, et d’ailleurs toujours inexpliqués, dans l’affaire Sarah Halimi.
D’abord, le silence des policiers, présents en nombre dans la cage d’escalier, écoutant patiemment les cris de la victime sous la torture, puis le choc de sa défenestration, avant qu’ils n’interviennent, plus d’une heure après que le meurtrier eut quitté les lieux.
Puis le silence de la presse française, qui ne commence à s’interroger qu’à la mi-mai 2017, autrement dit après l’élection présidentielle.
Et, bien sûr, le silence assourdissant de la juge d’instruction, refusant de retenir une possible motivation antisémite jusqu’en février 2018.
Le silence de la gauche, laissant ses seuls membres juifs porter les pancartes lors des manifs. Comme le notait Sartre, le Juif a «des ennemis passionnés et des défenseurs sans passion».
Enfin, il y a le mutisme des tribunaux, refusant un procès pour cause d’«irresponsabilité pénale».
Il délire, mais sa folie
– Polonius dans Hamlet
ne manque pas de méthode.
Le seul qui ne se taisait pas est le meurtrier, Kobili Traoré, vociférant après avoir jeté par la fenêtre celle qui était sa voisine depuis dix ans : J’ai tué le sheitan! La vision du chandelier à sept branches avait déclenché en lui une fureur meurtrière.